viernes, 10 de octubre de 2008

CUADERNO DEL BOSQUE DE PINOS -Fragmento


21 de agosto de 1940.


Hablemos nada más: cuando se penetra en un bosque de pinos, en un verano de gran calor, el placer que se siente es muy semejante al que ofrecería el tocador contiguo al baño de una salvaje aunque noble criatura. Brucería olorífera en una atmósfera recalentada y en los vapores que suben de la bañera lacustre o marina. Cielos como trozos de espejos a través de los cepillos de largos mangos finos cincelados de liqúenes. Olor sui generis de los cabellos, de sus peines y de sus horquillas. Transpiración natural y perfumes higiénicos mezclados. Abandonadas sobre la mesita del tocador, gruesas piedras ornamentales aquí y allá, y en las cimbras ese chisporroteo animal, este millón de centellas animales, esta vibración musical y canora.

Cepillos y peines a la vez. Cepillos donde cada pelo tiene la forma y el brillar de un diente de peine.
¿Por qué ha elegido ella cepillos de pelo verde y mangos de madera violeta cincelados de liqúenes verde gris? Porque esta noble salvaje es quizás pelirroja, y se sumergirá luego en la bañera lacustre o marítima contigua. Este es el tocador de Venus, con la bombilla Febo instalada en la pared de espejos.

He ahí un cuadro del que no estoy descontento, ya que da razón de un placer que todo hombre siente al penetrar, en agosto, en un bosque de pinos. Un poeta menor, y hasta un poeta épico, se hubiera quizás contentado con esto. Pero somos algo distinto a un poeta y tenemos algo distinto que decir.

Si hemos entrado a la intimidad de esos aposentos privados de la naturaleza, si gracias a ello han tenido la suerte de nacer a la palabra, no ha sido únicamente para que diésemos antropomórficamente razón de ese placer sensual ; es porque de ello deriva un co-nacimien-to más serio. Vayamos pues más a fondo.




Francis Ponge (Francia, Montpellier- 1899- Bar-sur-Loup,  1988)


(Traducción de Enrique Carrión)

21 août 1940


Parlons simplement: lorsqu'on pénètre dans un bois de pins, en été par grande cha-leur, le plaisir qu'on éprouve ressemble beau-coup à celui que procurerait le petit salon de coiffure attenant à la salle de bains d'une sauvage mais noble créature. Brosserie odoriférante dans une atmosphère surchauffée et dans les vapeurs qui montent de la baignoire lacustre ou marine. Cieux comme des morceaux de miroirs à travers les brosses à longs manches fins tout ciselés de lichens. Odeur sua generis des cheveux, de leurs peignes et de leurs épingles. Transpiration naturelle et parfums nygiéniques mélangés. Laissées sur la tablette de la coiffeuse, de grosses pierres orne-mentales par-ci par-là, et dans les cintres ce pétillement animal, ce million d'étincelles animales, cette vibration musicale et chanteuse.
A la fois brosses et peignes. Brosses dont chaque poil a la forme et le brillant d'une dent de peigne.
Pourquoi a-t-elle choisi des brosses à poils verts et à manches de bois violets tout ciselés de lichens vert-de-gris? Parce que cette noble sauvage est rousse peut-être, qui se trempera ensuite dans la baignoire lacustre ou marine voisine. C'est ici le salón de coiffure de Vénus, avec l'ampoule Phébus insérée dans la paroi de miroirs.
Voilà un tableau dont je ne suis pas mé-content, parce qu'il rend bien compte d'un plaisir que chaque homme éprouve lorsqu'il pénètre en août dans un bois de pins. Un poète mineur, voire un poète épique s'en contenterait peut-être. Mais nous sommes autre chose qu'un poète et nous avons autre chose à dire.
Si nous sommes entrés dans la familiarité de ces cabinets particuliers de la nature, s'ils en ont acquis la chance de naître à la parole, ce n'est pas seulement pour que nous rendions anthropomorphiquement compte de ce plaisir sensuel, c'est pour qu'il en résulte une co-naissance plus sérieuse. Allons donc plus au fond.



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